UNE ÉTOILE S’ÉTEINT, JEN KISH ANNONCE SA RETRAITE
Une des meilleures joueuses de rugby de sa génération, l’internationale canadienne Jen Kish a annoncé qu'elle prenait sa retraite après avoir représenté le Canada pendant plus d'une décennie.
L'ancienne capitaine, qui a mené le Canada à la conquête de la médaille de bronze olympique aux Jeux de 2016, espérait terminer la saison avant de prendre une décision à propos de son avenir, mais les blessures l'ont forcée à accrocher ses crampons plus tôt que prévu.
Les amateurs de rugby au pays seront sûrement déçus d'apprendre la nouvelle, mais c'est la décision qu'il fallait prendre, estime l'athlète de 29 ans.
« Je sais que ma retraite hâtive va peut-être en surprendre certains et que j'ai peut-être laissé tomber certaines personnes, mais du fond du cœur, j'apprécie tout le soutien que les gens ont manifesté à mon endroit au fil des ans », a déclaré Kish.
« Ça n'a pas été une décision facile de se résigner à ne pas terminer la saison, mais c'était la décision qu'il fallait prendre pour mon avenir et pour mon bien-être, tant physique que mental. »
Au cours des six derniers mois, l'athlète originaire d'Edmonton a eu de la difficulté à s'entraîner et à jouer en raison de la douleur qu'elle ressentait encore après ses deux dernières blessures – une déchirure labrale à la hanche subie au mois de mai dernier à l'occasion du Tournoi de R7 du Canada et deux hernies discales au cou découlant d'une blessure subie au Tournoi de R7 de Clermont en 2016.
« Bien que ces deux blessures importantes ne m'aient pas empêchée de jouer, elles ont représenté un défi sur le plan physique et un lourd fardeau sur le plan mental, et j'ai atteint mes limites quand à ma capacité de jouer malgré tout », a indiqué Kish. « La décision s'est résumée à l'évaluation des risques et des bénéfices. Ç'aurait été formidable de terminer ma dernière saison comme j'aurais voulu le faire, mais je suis quand même très fière de ce que j'ai accompli au cours de ma carrière et je suis enchantée de voir ce que la prochaine génération va faire pour s'assurer que le programme continue d'avoir du succès. »
Kish a laissé un héritage important dans le cadre du programme féminin.
Elle a commencé à jouer à l'échelle provinciale à l'âge de 16 ans et elle a vite gravi les échelons jusqu'à l'équipe canadienne U-19, devenant la capitaine de cette formation en 2006-07. Bien que Kish ait surtout joué au sein de l'équipe nationale féminine senior de R7, elle a commencé par le rugby XV, ce qui lui a permis de participer à trois présentations de la Coupe des Nations ainsi qu'à la Coupe du Monde de Rugby Féminin en 2010.
C'est à ce moment-là que l'entraîneur-chef de l'équipe canadienne féminine de R7, John Tait, l'a convaincue de passer à cette discipline. Et c'est bien qu'elle l'ait fait parce qu'elle allait devenir un des joueuses les plus dominantes au monde.
Kish a agi comme capitaine lorsque le Canada a décroché la médaille d'argent à la Coupe du Monde de R7 en 2013, la médaille d'or aux Jeux panaméricains de 2015 et la médaille de bronze aux Jeux d'été de Rio en 2016. Belle façon d'appliquer la philosophie 'À nous le podium'!
« Le fait d'avoir eu l'opportunité d'enfiler le maillot de l'équipe canadienne au cours des 13 dernières années s'est avéré un remarquable privilège », a dit Kish. « D'avoir pu être chef de file de l'équipe a été un honneur et un rêve. J'ai porté le chandail avec beaucoup de fierté et rien ne viendra aussi près de me donner les mêmes sensations. Ce qui a rendu le fait de porter le maillot si spécial, ce sont mes coéquipières. D'être entourée de mes semblables, de femmes qui ont travaillé fort et se sont soutenues jour après jour, qui étaient prêtes à faire tout ce qu'il fallait faire, voilà pourquoi j'étais si fière de porter ce maillot. »
Elle parle avec calme, mais en raison de ses tatouages inspirants et de ses formidables plaqués, Kisk était intimidante sur le terrain. Courant avec puissance, elle avait l'habitude d'y aller d'un geste spectaculaire ici et là pour rappeler à ses adversaires qu'elle était un peu plus à craindre que les autres.
« J'ai cherché à être la meilleure joueuse possible, pas seulement pour moi mais pour mes coéquipières », a indiqué Kish. « Mes coéquipières étaient à la source de ma motivation, elles m'ont inspirée. Les voir puiser dans leurs ressources lors de séances d'entraînement difficiles et dans les matchs, ça allumait le feu sacré en moi. »
Ancienne finaliste pour le trophée de Joueuse de l'année de R7 de World Rugby, Kish a été capitaine de la formation canadienne durant les années les plus fructueuses du programme, quand l'équipe n'a jamais fait pire que la troisième place dans la Série de R7 féminin de World Rugby.
« Je considère qu'elle et une poignée d'autres joueuses ont établi les bases de nos succès dans ce programme », affirme Tait. « Le fait qu'elle soit devenue une des joueuses les plus constantes au rugby à sept, non seulement au sein de notre équipe mais aussi dans le monde, ç'a été crucial dans les succès de nos équipes et pour la croissance du rugby au Canada. Elle a inspiré tellement de jeunes filles à jouer au rugby et à l'imiter. »
Kish s'est dit chanceuse d'avoir pu s'entourer d'un réseau de personnes qui l'ont soutenue tout au long de sa carrière, malgré les hauts et les bas.
« Il y a tellement de gens qui ont contribué à mes succès et j'aurais besoin d'une année au complet pour remercier tout le monde », a dit Kish. « Toutefois j'aimerais remercier la communauté de Rugby Alberta pour m'avoir soutenue dès mes débuts, ainsi que ma famille, mes amis, mes coéquipières, le personnel médical, les entraîneurs et les partisans. Sans tout ce monde-là, je ne me serais pas rendue jusqu'ici. »
« Je veux remercier tout particulièrement l'entraîneur Tait. Ça n'a pas toujours été facile comme parcours et par moments, je lui ai compliqué la tâche, mais je suis contente qu'il m'ait laissée emprunter un tel parcours. Il m'a non seulement permis de devenir la joueuse que je suis devenue aujourd'hui, avec l'aide de tous mes entraîneurs précédents, mais il m'a aussi aidée à devenir une meilleure personne parce qu'il a pris le temps d'apprendre à me connaître et il a été là pour moi, pas seulement au rugby, mais en dehors du terrain aussi. »
Tait reconnaît lui aussi que Kish et lui ont été confrontés à certains défis en cours de route, mais que ceux-ci ont fait d'eux de meilleures personnes.
« Il a fallu y mettre le temps et l'effort pour bâtir les liens de confiance qu'il y a maintenant entre nous », a indiqué Tait. « J'ai beaucoup appris d'elle sur mon travail d’entraîneur, sur la communication et l'importance de développer des meneuses fortes à l'interne. C'était beaucoup par essais et erreurs, mais en raison du fait que nous partagions des objectifs communs et un sens de la compétition, nous avions toujours une base en commun sur laquelle travailler quand nous étions en désaccord sur quelque chose.
« Elle a toujours mené par l'exemple sur le terrain, en sacrifiant son corps pour prendre possession du ballon dans les airs ou au sol, et elle n'a jamais reculé devant un défi; plus grand était le défi, mieux elle jouait. En dehors du terrain, elle défendait toujours l'équipe, le développement du programme et le sport féminin. »
Kish est suivie par beaucoup de gens sur les réseaux sociaux et elle profite de ses tribunes pour militer en faveur de la participation des femmes dans le sport et de différents enjeux liés au sport en général.
« C'est naturel pour moi de le faire en raison de ce que j'ai vécu quand j'étais jeune et durant mon parcours d'athlète, alors que je poursuivais mes rêves », a indiqué Kish. « J'ai vu beaucoup de mes amies renoncer au sport et ne pas aller au bout de leurs rêves en raison des inégalités entre les genres. Je crois qu'on a fait des progrès ces dernières années, autant dans le rugby que dans d'autres domaines. J'espère que cela se poursuivra pour toujours et j'encourage les femmes à continuer de se battre pour les choses qu'elles veulent dans la vie. »
À la suite de son bon travail à cet égard, Kish a été nommée l'athlète la plus influente en 2016 par l'Association canadienne pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique.
« Elle a beaucoup cheminé », a dit Tait. « Elle a failli à la tâche bien souvent et de plusieurs façons, mais elle a persévéré, elle a affiché la détermination et la foi en elle-même qu'il fallait avoir pour apprendre de ses erreurs et devenir une athlète de classe mondiale ainsi qu'une excellente personne. Elle a inspiré plusieurs jeunes gens dans la société qui ne cadrent pas nécessairement avec ce qu'on considère comme étant normal en ce qui a trait à ce qui les passionne ou aux attentes que les autres ont à leur égard. C'est ce qui fait qu'elle est si spéciale et que je sois aussi fière d'elle. »
Kish aimerait continuer de s'impliquer dans le sport et d'inspirer une nouvelle génération de joueuses, mais elle se concentrera pour l'instant sur sa rééducation et son entreprise en entraînement personnel.
« Les voyages autour du monde vont me manquer, tout comme jouer dans différents pays, dans des stades remplis de milliers de partisans, ainsi que cette sensation que je ressentais quand j'enfilais le chandail de l'équipe canadienne et que je me présentais sur le terrain avec mes coéquipières.
« Les amitiés ne me manqueront pas parce qu'elles seront toujours là, bien longtemps après le rugby. C'est la beauté de ce sport. Les liens ne seront jamais brisés. »